• Sortez les poubelles !

    Sortez les poubelles !Il n'y a pas que dans les rues des grandes villes que les ordures se répandent sur la voie publique. En politique aussi les poubelles deviennent des projectiles et ça pue encore plus que sur les trottoirs des grandes agglomérations. 

    Dans mon billet d'hier, je m'étais longuement attardée sur la prise de parole d'Olivier Marleix, président du groupe LR, dont la virulence m'avait interpelée.
    J'ai d'abord pensé à une réaction épidermique suite aux quenelles de Dupond-Moretti mais, bien que les faits soient graves, cela me paraissait insuffisant pour expliquer une telle charge.
    Puis, avant de trouver le sommeil, un fil d'actu Orange lu en diagonale m'est revenu en mémoire, J'ai joué les Ariane (pas la fusée mais la fille de Minos) pour retrouver le fil et... je n'ai pas été déçue.

    Ce fil d'actu, parmi d'autres sujets, mentionnait les accusations d'Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée, à l'encontre de certains députés LR.

    Mettez un masque, ça sent fort !

    Il y a beau temps que les citoyens ont perdu toute illusion  sur la probité des politiques, du maire de village au chef d'état.
    Si nous avons une forme de tolérance pour le premier qui agit à nos yeux dans l'intérêt de ses administrés, plus on grimpe sur l'échelle du pouvoir moins la tolérance est de mise car nous attendons de ceux qui nous gouvernent une obligation d'exemplarité.
    Le tout nouveau président Emmanuel Macron l'a bien compris qui, dès le début de son premier mandat lança la loi de moralisation de la vie politique, promulguée en septembre 2017.

    Depuis une semaine nos oreilles bruissent de sons discordants et des remugles viennent chatouiller nos narines.
    C'est l'interview qu'Aurore Bergé a accordée le 19 mars  à France Inter1 qui m'a poussée à aller plus loin.

    Tout s'achète, tout se vend

    Consciente de l'impact désastreux du onzième 49.3 dégainé trois jours avant par la première ministre, la Macronie se dégage de toute responsabilité en désignant des "coupables".

    Des Républicains qui se vendent ?

    Aurore Bergé n'est pas une nouvelle venue en politique puisqu'elle rejoint l'UMP (futur LR) à l'âge de 16 ans en 2002, après le choc de la présence de Jean-Marie le Pen au second tour de la présidentielle. Le moins qu'on puisse dire est qu'elle a le soutien fluctuant, de Morano à Sarko, en passant par Nathalie Kosciusko-Morizet, Juppé ou Fillon.
    Femme de convictions (¿), elle participe au lancement du mouvement Droite Lib qui se définit comme "mouvement pro-Fillon et anti-Macron" en janvier 2017 et... rejoint Macron en février.
    Désormais "macronolâtre", elle met ses talents reconnus en communication à porter la parole du président.

    Et elle n'y va pas avec le dos de la cuillère ! Fracassantes !
    C'est l'adjectif qui me vient à l'esprit en écoutant ses déclarations ou plutôt, ses accusations.

    Pour vous dire vraiment les coulisses, on va tout se dire ! [...]
    Quand, à la fin, vous avez des députés LR qui viennent frapper à la porte de Matignon en se disant prêts à voter la réforme, "par contre vous mettez 170 millions d’euros sur la table pour faire un contournement autoroutier". C’est ça qu’on a entendu ! [...]

     Fort heureusement, au gouvernement, on ne mange pas de ce pain là !

    Heureusement que le gouvernement a dit non. Heureusement que l’on a une Première ministre qui, à un moment, dit "mais attendez, on est chez les fous !"

    Les auditeurs tout comme les journalistes attendent des noms et peut-être même des preuves de ces allégations mais non : Aurore Bergé botte en touche.

    Les LR savent pertinemment qui chez eux est venu frapper à notre porte pour venir demander ce genre de choses

    Hors contexte, l'indignation d'Aurore Bergé peut paraître légitime à certains même si le procédé fait davantage penser à un lancer de boules puantes qu'à une opération mains propres.
    Mais pour peu qu'on remonte le temps de quelques jours, l'attaque de la député prend plus l'allure d'un contre-feu que d'un sursaut de probité.

    ou des Républicains qui s'achètent ?

    Ce ne sont que quelques lignes noyées dans un article2 signé Marcelo Wesfreid, Alexandre Sulzer et Quentin Laurent dans le Parisien du 14 mars, portant sur la quête de voix du gouvernement pour fait passer la loi aux votes.

    C’est l’histoire d’une députée Les Républicains parmi d’autres, plutôt opposée au projet retraites. « Les appels se sont multipliés depuis quelques jours », confie celle qui fait l’objet de pressions multiples. Un coup de fil venant de son propre groupe LR. Un autre émanant du cabinet du ministre des Relations avec le Parlement, Franck Riester.
    Et puis samedi, un appel du ministre de l'Économie, Bruno Lemaire en personne, pour tenter de la convaincre du bien fondé de la réforme... tout en glissant que le gouvernement saurait être "attentif"  à sa circonscription. Comprendre : en débloquant des moyens sur les priorités de son territoire.

    Dans son numéro du 16 mars, c'est au tour de Libération3 de se faire écho de ces méthodes. 

    Parmi ces coups de fil passés tous azimuts, des députés, hésitants ou rétifs, se sont faits l'écho de l'attention soudaine des macronistes aux besoins de leur circonscription. "Cette méthode d'achat de voix à la House of Cards, n'est pas très bénéfique pour le Parlement", sermonne le député LR Pierre-Henri Dumont.

    Le quotidien cite le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, qui récuse ces allégations avec force.

    Je vous garantis qu'on est vraiment dans le cadre strictement normal. Il n'y a rien qui sorte des règles habituelles de relations entre le gouvernement et les parlementaires.

    Comme le souligne Libération ces pratiques sont "classiques" (on s'en doutait un peu) mais elles posent suffisamment problème pour que certains élus s'en ouvrent publiquement, tel le député LR Pierre Cordier, au micro des GG, de BFM TV ou encore au micro de Serge Faubert4.

    Une crise dans la crise ?

    Quelles retombées politiques ?

    Suite à la parution de l'article du Parisien, Mathilde Panot, présidente du groupe LFI demande la saisine de la Cour de Justice, seule autorité à pouvoir poursuivre un ministre en exercice.

    M. [Bruno] Le Maire aurait par conséquent proposé, sans droit et directement, une ’promesse’ ou un ’avantage quelconque’ à une personne investie d’un mandat électif public pour qu’elle accomplisse un acte prévu par son mandat de député. [...]
    S’ils sont avérés, ces faits particulièrement graves nous semblent correspondre aux éléments constitutifs de l’infraction prévue à l’article 433-1 du Code pénal

    De son côté Marine le Pen fait du bruit en accusant avec force indignation, le gouvernement et LR de corruption sir le plateau d'Apolline de Malherbe mais s'abstient prudemment de toute action. Faut pas confondre courage et témérité.

    Très surprenante fut l'intervention d'Olivier Marleix, également sur le plateau d'Apolline de Malherbe.

    Son ancien collègue républicain n'a pas fait ça, quant à la députée LR qui avait témoigné, curieusement, elle s'est désistée. Les loups ne se mangent pas entre eux...
    Seul point à retenir, le président du groupe LR attend d'Aurore Bergé qu'elle s'explique ou qu'elle s'excuse.

    Par contre chez Renaissance on commence à souhaiter que celle que ses anciens partenaires UMP/LR avait baptisée "chat noir", la mette un peu en veilleuse.
    Si le parti présidentiel a échappé à la catastrophe, l'exécutif reste fragilisé et il y a peu de chance que les déclarations incendiaires du président aujourd'hui ramènent de la sérénité dans le chaos qu'il a lui-même créé. 
    C'est dire si plus que jamais la moindre voix LR comptera dans les prochaines séquences parlementaires pour trouver une "majorité élargie".

    Une crise de confiance populaire

    Les dernières élections législatives ont confirmé, s'il en était encore besoin, que la défiance du peuple envers la gente politique avait glissé vers un mépris pour ne pas dire une détestation globale des politiques.
    Que les accusations des uns et des autres soient avérées ou non, les citoyens-électeurs sont désormais confortés dans l'idée du "Tous pourris" et que quoi qu'ils votent, la magouille et les intérêts personnels passent largement avant les intérêts  des Français. 
    Alors que dans les autres démocraties de telles révélations auraient provoqué une "démission" des acteurs politiques concernés, avant que ne tombent les suites judiciaires, en France les privilèges de l'impunité ont survécu à l'ancien régime.
    Si dans notre pays on ne guillotine plus les rois, le couperet des urnes risque de décapiter une Marianne désormais en haillons, sauf sursaut de nos politiques de tous bords en se rappelant ce qu'écrivait Saint Just.

    Les institutions sont la garantie du gouvernement d'un peuple libre contre la corruption des mœurs, et la garantie du peuple et du citoyen contre la corruption du gouvernement.

     


    1 : France Inter, "Questions politiques" l'intégrale.
    2 : article réservé aux abonnés
    3 : article réservé aux abonnés
    4 : Serge Faubert, journaliste politique, pour sa chaîne Pure Politique

    « Motions de censure rejetéesL'importuniste »

    Tags Tags : , , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :